Actualités jurisprudentielles en droit social

Lettre d'information - novembre 2019

Deux décisions rendues en octobre dernier par la Cour de Cassation (C.Cass. 16.10.2019) et la Cour d’appel de Paris (C.A. Paris 30.10.2019) sont venues préciser les effets de la transaction et la validité du barème « Macron ».

La portée de la transaction en droit du travail

Pour rappel, la transaction est fréquemment utilisée en droit du travail pour éteindre un litige, né ou à naître, résultant de la relation contractuelle entre le salarié et l’employeur. Elle ne relève pas du droit du travail mais bien du droit civil, les parties s’entendant généralement sur les conditions de non recours, modulo le versement d’une indemnisation par l’employeur.

Elle est fréquemment utilisée après la rupture du contrat de travail. Dans les faits d’espèce, il s’agissait d’une transaction intervenue durant l’exécution du contrat de travail du salarié en 2007, par laquelle ce dernier obtint un rappel de salaire ainsi qu’un reclassement à un nouveau coefficient hiérarchique. A ce titre, rappelons que la Haute Autorité avait déjà jugé que la conclusion d’une transaction concernant l’exécution du contrat travail était autorisée (C.Cass. 10.03.1998). Plusieurs années plus tard, le salarié attaque son employeur pour obtenir le paiement de diverses sommes lui revenant à compter de 2008.

La Cour d’Appel a rejeté les demandes du salarié, précisant que même si le litige initial de la transaction avait été neutralisé en 2007, les demandes ultérieures étaient irrecevables dans la mesure où la transaction avait un objet plus large que la demande originelle du salarié.

Dans le passé, la Cour de Cassation a eu sur ce sujet une vision tantôt restrictive (les litiges non envisagés dans la transaction ne sont pas éteints), tantôt extensive (lorsque le salarié renonce à toutes réclamations à l’encontre de l’employeur et/ou à l’exécution du contrat de travail, la renonciation a une portée générale et toute action en justice devient irrecevable).

La Cour de Cassation est venue casser la décision de la Cour d’appel en précisant que la transaction rédigée en termes généraux interdit toute demande d’indemnisation ultérieure (interprétation extensive désormais adoptée par la Cour de Cassation) mais pas si la demande porte sur des faits survenus pendant l’exécution du contrat postérieurement à la transaction, comme c’est le cas en l’espèce (interprétation restrictive).

Cette solution vient donc confirmer qu’en pratique, il est primordial de conclure une transaction à l’issue de la rupture du contrat de travail en des termes suffisamment généraux pour protéger l’intérêt des parties.

La position constante du Juge devant le barème « Macron »

Le barème « Macron » mis en place en septembre 2017 et codifié à l’article L.1235-3 du Code du travail, prévoit une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un minimum et un maximum, variant selon l’ancienneté du salarié.

Depuis l’adoption de ces nouvelles dispositions, de nombreux contentieux sont apparus, salariés licenciés et organisations syndicales invoquant le non-respect de l’article 24 de la Charte sociale européenne (CSE) et de l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Ce dernier précise qu’en cas de licenciement injustifié, il appartient (sur renvoi à l’article 8 de ladite convention) à l’autorité compétente de déterminer le versement d’une indemnité adéquate. C’est donc au Juge qu’appartient ce pouvoir en droit interne.

Dans sa décision, la Cour d’appel écarte d’une part l’application de la CSE, au motif qu’elle n’a pas d’effet direct entre les particuliers en droit interne, et reconnait d’autre part l’application des dispositions de l’OIT tout en précisant que « la mise en place d’un barème n’est pas en soi contraire aux textes […] imposants aux Etats, en cas de licenciement injustifié, de garantir au salarié une indemnité adéquate ou une réparation appropriée, le juge français, dans le cadre des montants minimaux et maximaux édictés sur la base de l’ancienneté du salarié et de l’effectif de l’entreprise, gardant une marge d’appréciation. »

Cette jurisprudence tempère la décision récente de la Cour d’appel de Reims (C.A. Reims 25.09.2019) qui reconnait la conformité du barème « Macron » aux textes internationaux mais qui laisse tout de même au juge un pouvoir d’appréciation rapporté à chaque cas d’espèce, selon lequel il peut ou non écarter l’application du barème s’il porte atteinte au droit à réparation adéquate.

La décision rendue par la Cour d’appel de Paris portait sur un licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié ayant 16 ans d’ancienneté, pouvant obtenir entre 3 et 13,5 mois de salaires en vertu du barème « Macron », l’indemnité accordée et jugée adéquate s’élevant à 13 mois de salaires bruts compte tenu des circonstances (âge du salarié, indemnisation pôle-emploi, formation rémunérée…).

Il convient toutefois de rappeler que le « barème Macron » ne protège pas l’employeur d’un éventuel recours du salarié pour réparation d’un préjudice subi (harcèlement, préjudice moral …).

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